Date de sortie : 04 octobre 2024 | Label : Riot Season Records
Tu aimes les Stooges, Brainbombs voire Flipper ou Stick Men With Ray Guns, alors tu dois aussi être perméable aux disques de The Shits et ceux de Foot Hair (et quelques-uns de Shit & Shine ou d’USA/Mexico) et il y a fort à parier que tu tombes en pâmoison devant celui de Louse, Creep Call.
C’est un peu facile puisqu’on retrouve dans Louse quelques The Shits et Foot Hair réunis autour de leur amour du riff crasseux (et psychopathe) et du chant lysergique (et psychopathe). Au menu, neuf titres monolithiques (et psychopathes) qui écorchent les neurones et appuient sur les plaies pour exposer leur vision du bien être. C’est très réussi et ça flingue immédiatement le moindre embryon de pensée jusqu’à ce qu’il ne subsiste plus que de la boue toxique dans la boîte crânienne. Et pourtant, comme à l’habitude avec ce genre d’animal hirsute, c’est franchement attirant. Voire obsédant. Il ne se passe pas un jour sans que j’écoute Creep Call (mais c’était déjà pareil avec l’unique album de Foot Hair ou ceux de The Shits) parce que sous les atours dégueulasses, malsains et méchamment chaotiques, il y a une forme de pureté et un jusqu’au-boutisme très addictifs qui affleurent.
Creep Call et Louse, c’est très loin d’être n’importe quoi. Ça sonne exactement comme la rencontre des deux groupes abondamment précités qui s’emboitent ici parfaitement et alors qu’on savait que The Shits avaient déjà partagé un split avec Louse, s’ils l’avaient fait avec Foot Hair, ça donnerait certainement Creep Call : une collection de morceaux aux titres avenants (Worm, Suffer, Wet Work ou le sans doute très ironique The Good Life) qui tournent en boucle, répétant les mêmes obsessions, les mêmes riffs, invitant parfois un saxophone à l’agonie (You Don’t Eat The Bull) et recouvrant le tout d’une masse sale et grouillante essentielle pour exacerber le chaos.
C’est immédiatement surprenant avec Worm qui se ruban-adhésive tout de suite au cerveau : tempo enlevé, riff-enclume fourbe et mémorable, chant expulsé voire expectoré, feedback vrillé. La suite remanie tous ces éléments dans des configurations toujours sidérantes : répétitions maladives (Suffer, Material, Wet Work), écroulements mortifères (Phrogging, Wishlist/Slave Morality), 100 mètres dévastés (You Don’t Eat The Bull, Camel Blue, The Good Life) et pour de vrai, tout ça tout le temps en même temps. On sent littéralement le disque nous rouler dessus puis nous laisser là, sur le bas-côté, tout près du caniveau, là où naissent, grandissent et meurent les obsessions de Louse.
Alors, oui, c’est noir, c’est glauque, c’est dégueulasse, ce n’est pas donné, encore moins offert. C’est là et c’est tout. Et c’est obsédant parce que « the record is the result of a (wasted) life’s work honing and toning the platonic ideal of single-riff noise rock » et que Louse, désormais, maîtrise complètement le truc (il suffit de jeter une oreille aux cassettes et démos inaugurales pour bien se rendre compte que tout était encore en devenir). Avec un son à la hauteur (James Atkinson à la captation et S. Bishop au mastering), Creep Call sonne comme une évidence et s’accorde parfaitement à notre époque de merde (et à sa pochette giallesque).
Et en cela, il se révèle vital.
leoluce