Aluk Todolo – Lux

Date de sortie : 06 septembre 2024 | Labels : The Ajna Offensive, Norma Evangelium Diaboli

De prime abord, aucune envie d’écrire quoi que ce soit. Lux échappe aux mots parce que son écoute en génère trop. À la limite, on pourrait se contenter de faire un dessin. S’inspirant du codage de la pochette (des points, petits ou gros, pour seul titre donné à chaque morceau ; en fait, les signatures rythmiques de chacun). Dans la discographie d’Aluk Todolo, celui-ci serait un gros point noir sur fond noir. Une sorte de Malevitch arrondi qui romprait avec les lettres enchevêtrées de Voix et la photographie hantée d’Occult Rock (ou des précédents).
Un gros point, noir et plein. Renfermant une multitude d’autres points noirs et pleins, petits et gros qui, tous ensemble, dessineraient la forme générale. Un truc un peu infini, insondable. De loin, simplement un point et de près, une constellation apparaissant par différence de matités que seule la lumière révélerait .
Le noir d’Aluk Todolo n’existe que grâce à la lumière. On n’y voit rien mais on ne voit qu’elle au départ et une fois que les yeux ont fait leur mise au point, on arrive à distinguer des choses dans le halo. Un peu comme le groupe en concert qui s’enchevêtre autour d’une simple ampoule. Pour sa musique, c’est pareil. De prime abord, on la prend dans la gueule et plus on avance, plus on distingue des choses puis on reprend du début pour tenter de repérer ce qui avait échappé au départ.

Écouter un disque d’Aluk Todolo, c’est toujours une expérience. Ça ne bouge pas vraiment et pourtant, c’est systématiquement différent. Chaque nouvelle occurrence modifie toutes les autres et on se dit que la mise au point n’arrivera jamais. Ce n’est pas flou, c’est nébuleux. Ça ne creuse pas autour, ça creuse en-dedans. Le son claque comme une trique (parfaitement capté au Kerwax), la guitare désaxe, la basse explore et la batterie combine, chacune obéissant à une équation invisible où jazz, noise, black, kraut, surf, swamp, psyche et j’en passe sont à la fois les inconnus et le résultat.
Plus que jamais, c’est un maelström, un vortex qui s’enroule sur lui-même, qui implose et se concentre en un gros point noir et dense, comme un Big Bang à l’envers. Quelque part, tout est déjà inscrit sur la pochette : une nouvelle reconfiguration du logo d’Aluk Todolo, les mêmes échardes disposées différemment.
C’est vrai que Lux commence presque tranquille via l’entame mais ça se fusèle assez vite pour ne plus lâcher son étreinte six morceaux durant, en instaurant une transe psychédélique au vitriol, sombre, chirurgicale, cosmique, géniale. Comme d’habitude, il n’y a pas de chant mais ça raconte beaucoup et ça fait naître plein d’images abstraites dans la boîte crânienne. C’est conceptuel, cérébral mais c’est vif aussi. Bien que plutôt court, Lux semble durer longtemps tant il reconfigure le temps via les multiples changements de direction qu’il renferme. Plus contrasté que Descension ou Finsternis, plus succinct qu’Occult Rock, plus oblique que Voix, très psycho-motorik, même si ça ne se joue pas à grand chose puisqu’au fond c’est toujours la même matière.

C’est à la fois halluciné et rentre dedans, mystique et terre à terre, ça lève le pied aussi souvent que ça court le 100 mètres, ça atteint des hauteurs vertigineuses autant que ça creuse en profondeur et en se déployant comme ça dans toutes les directions, Aluk Todolo et Lux prennent les commandes de l’encéphale.
Et soudainement s’arrêtent.

leoluce

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